Après plusieurs années passé aux États Unis, Mark revient, avec sa femme et ses deux enfants, en Espagne, pays où il est né. Ils s'installent dans une demeure isolée, qui semble hantée par de lourds secrets...
La secte sans nom (1999) de l'espagnol Jaume Balagueró a été produitpar Fantastic Discovery, branche de la compagnie Fantastic Factory destinée àproduire les premières oeuvres de jeunes réalisateurs. Il a été très bien accueilli dans les festivals de cinémafantastique. Or, alors que La secte sans nom était encore en montage,Fantastic Factory décida de financer le projet suivant de Balagueró, sobrementappelé Darkness. Dimension, filiale de la firme américaine Miramax,accepta de participer au financement et à la distribution de ce nouveau film à conditionqu'il soit tourné en anglais. Rappelons que Dimension s'est maintes foisillustrée dans le domaine du cinéma fantastique aux États-Unis cesdernières années, avec des titres à succès tels que : Scream (1996)de Wes Craven, Une nuit en enfer (1996) de Robert Rodriguez, Scarymovie (2000)... Darkness bénéficie d'un casting international intéressant. Lerôle de la jeune Regina est tenu par Anna Paquin, actrice révélée dèsl'enfance par La leçon de piano (1994) de Jane Campion et vue récemmentdans X-men (2000) et X-men 2 (2002) de Bryan Singer. A sescôtés, on trouve la comédienne suédoise Lena Olin (Après la répétition(1984) d'Ingmar Bergman, La neuvième porte (1999) de RomanPolanski...) et l'acteur italien Giancarlo Giannini (L'innocent(1976) de Visconti, Hannibal (2001) de Ridley Scott...).
Mark, après plusieurs années passées aux États Unis, revient s'installerdans son pays natal, l'Espagne. Accompagné par sa famille (son épouse Maria,sa fille Regina et son fils Paul), il emménage dans une vaste demeure située dans larégion de Barcelone, près de la clinique où travaille son père, Albert. Tout ne se passe pasidéalement. Regina est malheureuse d'avoir quitté le pays où elle a grandi.Mark se met à avoir de graves crises nerveuses, ce qui ne lui était pasarrivé depuis des années. En plus, il semble tomber sous l'emprise de cetteétrange demeure. Le petit Paul prétend que des entités malfaisantesle maltraitent pendant le nuit. Maria, de son côté, minimisel'importance de ces problèmes. Regina mène son enquête et découvre qu'un terrible drame s'estdéroulé dans cette maison, des années auparavant...
Darkness se présente donc comme un film de maison hantéeultra-classique, reprenant des schémas assez usés du début des années 1980. Shining,bien sûr, domine d'une tête, avec sa famille malheureuse, dont le petitgarçon est malmené par des spectres tandis que le père tombe, sousl'influence de la demeure maudite, dans une folie s'illustrant par descomportements obsessifs. Amityville, la maison du diable (1979) proposaitun récit aussi assez semblable, en y ajoutant de sombres histoiresd'occultisme et de passages secrets. Enfin, L'au-delà (1981) de LucioFulci nous fait visiter une maison hantée par l'esprit d'un sorcier, et seconclut par un de ces dénouements sombres et apocalyptiques dont leréalisateur italien avait fait sa spécialité. A ces formules bien rodées, Balagueróajoute encore quelques éléments classiques de l'épouvante, du style jouethanté, vieilles photos moisis, magie noire...
Tout cela n'est donc pas très original. Pourtant, le remploi de ces canevasclassiques semble, dans un premier temps, assez prometteur, notamment avec sesdéveloppements sur l'occultisme. La peinture de cette famille déchirée, dont la tristesse quotidienne va servir denid aux forces du mal, prolonge certaines idées de La secte sans nom,tout en proposant une structure dramatique autrement plus solide etsatisfaisante. On apprécie une photographie néo-gothique extrêmementsoignée, ainsi qu'une direction artistique globalement réussie(l'appartement...). Le jeu de certains acteurs (particulièrement Lena Olin etGiancarlo Giannini) est intéressant. Par contre, Anna Paquin est assezinégale, tandis que Ian Glen, qui incarne Mark, peut sembler un peu fade.
Hélas, tous les atouts de Darkness sont quand même gâchés, en partie à cause d'unrythme terriblement languissant. Balagueró tombe dans un des pièges classiquestendus par la peur suggestive : à force de cultiver le "non-vu", onpeut perdre l'attention du spectateur, qui devient impatient. Ainsi, Darknesssemble mettre une bonne heure à trouver son rythme. Qui plus est, laréalisation est globalement peu inspirée. Accumulant les scènes de dialoguesen champs / contre-champs, cadrés en gros plan, elle est rapidement assommante debanalité. Pour tenter de faire sourdre l'angoisse, Balagueró a recours à des"trucs" assez artificiels qu'il avait déjà employés dans La sectesans nom : éclairage zénithal appuyé, caméra tremblotante,chuchotements, bruitages passés à l'envers, flashs subliminaux, éclairagesélectriques instables, recours à un bric-à-brac de clichés de l'épouvante(petite fille en robe démodée à l'allure inquiétante, vieux gramophone,portes qui se ferment toute seules, vieilles femmes mystérieuses...)... Celasemble d'autant plus irritant qu'en fin de compte, bien peu de ces éléments netrouvent leur justification dramatique dans le film lui-même. Comme dans Lasecte sans nom, de nombreuses pistes semblent cruellement sous-exploitées(Qui sont les trois vieilles de la photo ? Que veulent les spectres des enfants? Qui persécute le petit garçon ?...).
Darkness s'avère donc plutôt décevant. Peu original, proposant unrécit prometteur, mais insuffisamment développé, souffrant de cruelleslongueurs et d'une réalisation inégale, sa noirceuret ses bonnes intentions ne rattrapent que partiellement ses défauts. On esttout de même loin de la rigueur d'oeuvres tournées dans le même pays, à lamême époque par Alejandro Amenabar (Les autres (2001)) ou Guillermo DelToro (L'échine du diable (2001)).
Bibliographie consultée :